Newsletter 6, septembre 2023
Hommage à Anne-Marie Levelut

Chers collègues,

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès d’Anne-Marie Levelut à l’âge de 86 ans. Nos pensées vont d’abord à sa famille et à ses proches.

Anne-Marie a joué un rôle immense pour nombre d’entre nous et nous sommes profondément affligés par cette nouvelle.

Ancienne élève d’André Guinier, Anne-Marie Levelut fut l’un des piliers de l’équipe de diffusion des rayons X, depuis la fondation du Laboratoire de Physique des Solides (LPS) jusqu’à son départ à la retraite en 2001.

Elève-ingénieure de l’ESPCI, elle rejoignit le laboratoire au début des années 1960 pour y préparer sa thèse d’état sur la diffusion des rayons X aux petits angles. Elle y initia ensuite les premières études structurales de la « matière molle ». En collaboration avec de nombreux chimistes, elle révolutionna la relation entre la structure moléculaire et l’organisation des phases cristal-liquides en dépassant la vision simpliste des molécules en forme de bâtonnets par l’introduction de formes et de propriétés variées : molécules discoïdes, coniques, polaires, composés ioniques, à transfert de charges, organométalliques, polymères cristaux liquides, assemblages supramoléculaires … Au-delà de cette variété, elle a classifié toutes les phases cristal-liquides en précisant rigoureusement leurs propriétés de symétrie.

En récompense de la qualité de ses travaux, elle a reçu le prix Félix Robin de la SFP en 1998. Après avoir quitté le laboratoire, elle a consacré son temps à sa famille, aux randonnées en montagne qu’elle affectionnait tout particulièrement, mais aussi à la rédaction d’un ouvrage de référence sur les phases cristal-liquides chères à son cœur, ouvrage qu’elle a pu achever il y a quelques mois, malgré une santé devenue fragile.

Tous ceux qui l’ont connue peuvent témoigner qu’Anne-Marie possédait une intuition exceptionnelle de l’organisation de la matière molle à l’échelle moléculaire, une maitrise proverbiale de l’espace réciproque et un talent hors-pair d’expérimentatrice. Elle a formé de nombreux thésards dont plusieurs ont poursuivi une carrière académique et beaucoup de visiteurs et chercheurs post-doctoraux étrangers sont venus de loin pour bénéficier de son enseignement.

Au delà d’un premier abord réservé, c’était une personne passionnée qui nous laisse un héritage scientifique remarquable.

 Marianne Impéror et Patrick Davidson